« Raison d’être : l’inévitable essor d’un concept aux contours flous »
À l’occasion de la sortie de l’édition 2021 du Choiseul 100, Sophie Blégent-Delapille, Avocate associée, Managing Partner du Cabinet d’avocats Deloitte|Taj et partenaire de notre classement, décrit l’urgence d’engager une réflexion sur les contours de la raison d’être des entreprises.
La mission des entreprises au sein de la société n’a jamais été autant débattue que ces derniers mois. La crise a redéfini notre rapport au travail et l’impératif de la protection des salariés s’est imposé comme une exigence de premier plan pour chaque acteur économique. Parallèlement, les enjeux d’inclusion, de diversité et de respect de l’environnement se sont affirmés comme des enjeux clés de gouvernance pour les directions générales.
Dans ce contexte, il est logique que la raison d’être, consacrée par la loi Pacte, soit une notion en plein essor. Il est désormais inscrit noir sur blanc qu’une entreprise peut s’assigner dans ses statuts d’autres objectifs que la seule recherche de profits.
Pourtant, les implications juridiques liées à l’inscription d’une raison d’être dans des statuts ne sont pas évidentes. Que se passerait-il si une entreprise devait manquer à ses engagements ? La loi exclut que cela puisse être une cause de nullité des décisions non conformes. Mais il peut s’avérer difficile pour un dirigeant d’évaluer les risques associés à l’adoption d’une raison d’être vis-à-vis des actionnaires, des collaborateurs, des prestataires ou encore en cas de futures acquisitions.
Limiter les risques en allouant les ressources nécessaires
Pourtant, la relative incertitude juridique autour de cette notion ne doit pas être un frein à l’engagement des entreprises. Les attentes sont très élevées alors que 75 % des salariés interrogés dans une étude IFOP estiment qu’il est important que la raison d’être de leur entreprise soit présentée. Près de 60 % affirment même être prêts à participer à son élaboration le cas échéant !
Ainsi, engager la réflexion autour de la raison d’être peut être un moyen pour les dirigeants de mobiliser les collaborateurs autour d’un projet commun puissant. Il s’agit également d’une opportunité pour l’entreprise de valoriser son engagement auprès de clients de plus en plus sensibles aux démarches responsables.
À défaut d’un cadre précis, il convient pourtant de prendre des précautions. Il est clé de mener un travail de réflexion sur les moyens humains, financiers et organisationnels nécessaires à la réalisation des objectifs fixés dans les statuts et veiller avec attention à ce que des moyens adaptés soient bien alloués à la réalisation de la raison d’être.
Pour l’ensemble des jeunes dirigeants distingués cette année par l’Institut Choiseul, l’enjeu prioritaire est sûrement « l’urgence d’attendre » avant de formuler sa raison d’être ! Urgence à se préparer, à engager dès à présent une réflexion sur les contours éventuels de la raison d’être, et l’ensemble des implications futures pour la société… Pour donner un sens puissant à son action, il faut d’abord baliser le chemin.
Retrouvez l’édition 2021 de notre classement Choiseul 100 et les mots de nos partenaires ci-dessous.