Paroles de lauréats : Emmanuel Pottier
3 / 24.04.2020

Paroles de lauréats : Emmanuel Pottier

Face à la crise, chaque jour, les lauréats et alumni Choiseul, mais aussi plusieurs de nos amis et partenaires,  réagissent. Une série d’échanges avec plusieurs d’entre eux  qui nous font part de leur vécu, nous exposent leurs stratégies de rebond mais aussi nous livrent leur vision du « jour d’après ».  

Aujourd’hui avec Emmanuel Pottier, alumni Choiseul 100 France & lauréat Choiseul Ville de demain et directeur général adjoint de Clear Channel, l’un des leaders mondiaux de l’affichage publicitaire.

Notre business model ne changera peut-être pas beaucoup mais nos relations oui.

La crise sanitaire mondiale que nous subissons aujourd’hui déstabilise fortement le marché de la publicité. Comment êtes-vous impacté ? Face à cette crise inédite, comment avez-vous adapté votre organisation ?

En effet, en tant qu’acteur de la publicité extérieure nous subissons à plusieurs niveaux cette crise sans précédent. Tout d’abord les impacts du confinement ont par définition réduit l’audience de la rue et donc l’attrait naturel de nos univers de communication. Par ailleurs, beaucoup de lieux publics à forte audience ont fermé comme les grands centres commerciaux où nous opérons. Mais force est de constater que même les médias qui ont vu leur audience augmenter sont aussi fortement impactés (TV, digital…). Car les marques ont eu pour réflexe de repenser leur communication et de réduire ainsi drastiquement leurs investissements publicitaires.

Notre premier réflexe a été de préserver la santé de nos collaborateurs et notamment notre population nomade (afficheurs). Nous avons donc interrompu l’affichage des campagnes et décidé ensuite rapidement de la mise en chômage partiel ou en télétravail des effectifs pour maintenir la continuité de notre activité et protéger la pérennité de notre entreprise, Aussi, nous avons identifié les métiers clés à maintenir en télétravail pour gérer la crise (reports des campagnes de publicité, discussions avec nos parties prenantes villes, collectivités et opérateurs privés, maintien des projets stratégiques…) mais aussi s’assurer que nous serons bien préparés pour la reprise post confinement.

Nous nous sommes également particulièrement attachés à agir équitablement en préservant nos partenaires les plus vulnérables économiquement – aussi bien de grands acteurs industriels que des start-up partenaires – afin d’être en phase avec nos valeurs centrales d’équité et de solidarité.


De quelle manière votre entreprise s’est-elle mobilisée pour lutter contre l’épidémie ?

La limitation des risques s’est faite naturellement en réduisant au maximum notre activité dans les lieux publics (rue, centres commerciaux, réseaux de transport). Ensuite nous avons diffusé les messages sanitaires pour sensibiliser au maximum la population sur les mesures barrières grâce à nos mobiliers urbains digitaux avec leur important maillage territorial. C’est notre force en tant qu’acteur de la communication extérieure et nous avons décidé de la mettre à 100% au service de la lutte collective.

Nous sommes maintenant dans la phase de préparation de la reprise progressive avec toutes les précautions nécessaires et le respect total des règles sanitaires (sécurité, hygiène,…). Ce qui est certain c’est que nous continuerons à limiter les risques d’exposition de nos collaborateurs autant de temps que nécessaire.


Comment vous projetez vous dans l’après crise ? Votre business model sera-t-il durablement transformé ? Voyez-vous dans cette crise, une fois qu’elle sera terminée, des opportunités nouvelles pour un groupe comme Clear Channel ?

Notre business model ne changera peut-être pas beaucoup mais nos relations oui.

Malgré la crise qui devrait durer, nous sommes persuadés que nos univers vont être les premiers à bénéficier de la reprise ; en effet, les marques vont devoir se mobiliser pour communiquer et toucher une population qui aura vécu un confinement long, des douleurs personnelles et collectives. Nous aurons tous une forte « envie d’extérieur », une envie de plein air, de balades et de rencontres. Cette crise souligne aussi l’importance du lien social dans le monde réel absolument essentiel et tout à fait complémentaire à l’inventivité digitale que cette crise a par ailleurs fait émerger. Et puis, les industriels auront également besoin de communiquer massivement à proximité des lieux d’achat pour reconquérir des parts de marché dans « le monde d’après ».

En revanche le ton et la forme seront très importants et vont devoir évoluer ; nous travaillions déjà depuis de nombreuses années à de nouvelles forme de narration publicitaire pour les marques avec des partenaires prestigieux comme Brut ou Beaux Arts. Plus que jamais, nous sommes persuadés qu’expliquer ce que les marques ont fait, font et feront demain pour la société, le citoyen et le consommateur va être clé, car entre autres choses, cette crise marque belle et bien la fin de la scission entre consommateur et citoyen.


Selon vous, quels changements majeurs caractériseront le “monde d’après” ? 

Le « monde d’après » sera un monde qui va, je l’espère, se construire collectivement et solidairement. Plus que jamais, nous serons en quête de sens, de bienveillance et de solidarité dans nos actions et relations tant professionnelles que personnelles.

À nouveau, le capitalisme va devoir muter et sans doute qu’après le modèle Industriel du début du 20eme siècle, la Financiarisation des années 1980-2010, nous allons tous devoir construire une nouvelle page de l’Histoire économique.

Enfin, je pense que cela va nous forcer à devenir plus humble et à réaliser que l’être humain peut se trouver dépasser par des phénomènes dont il est en partie lui-même responsable


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